Dans la mythologie, la licorne est un animal rare dont la corne est symbole de puissance, de faste et de pureté. Elle a été choisie pour désigner, dans le monde des affaires, des entreprises valorisées à 1 milliard de dollars. Avec le temps, elle a donné naissance à un nouvel animal encore plus merveilleux et singulier : la super-licorne.
Le secret de la licorne
Aileen Lee, fondatrice de la société d’investissement Cowboy Ventures, cherchait à décrire par un terme simple et symbolique les nouvelles entreprises technologiques les plus prospères parmi celles créées après 2003, dont la valorisation avait atteint 1 milliard de dollars. En 2013, elle détournait dans ce but le mot « licorne ».
La licorne est un habitant bien connu du bestiaire légendaire. Elle prend la forme d’un cheval dont le front est orné d’une corne. Aileen Lee a choisi cet animal fantastique, objet de tous les fantasmes, pour souligner combien l’objet de sa recherche était rarissime. Facebook arrivait premier, suivi de LinkedIn, Twitter et Groupon.
En moyenne, entre 2003 et 2013, quatre licornes naissaient chaque année, divisées entre quatre domaines :
- Sites d’e-commerce
- Sites gratuits générant des revenus publicitaires
- Sites de logiciels de service
- Sites de logiciels professionnels
La super-licorne, une entité à plus forte valeur ajoutée
Mais, dans ce domaine, la réalité a rattrapé la fiction. Et cette réalité va beaucoup plus vite qu’on ne pourrait l’imaginer. En deux ans, les licornes se sont multipliées et étalées sur la planète entière, tandis que leur modèle mythologique, lui, restait à l’état de fantaisie. En 2015, on en recense quelques 96 dans le monde, notamment en Amérique du Nord, en Asie et en Europe.
Avec le temps, une espèce nouvelle est apparue, bien plus puissante que la licorne théorisée par Aileen Lee : la super-licorne. Celle-ci ne caractérise plus une entreprise technologique valorisée à 1 milliard de dollars, mais à plus de 10 milliards de dollars ! La licorne a pris du poids et de la valeur. Elle est devenue plus fantasmatique encore que le Jabberwocky de Lewis Carroll.
Le graphique ci-dessous montre le temps qu’il a fallu aux start-up créées après 2000 pour devenir des licornes, puis des super-licornes. La plus valorisée fut aussi la plus rapide à atteindre des chiffres records : Facebook. Dans son sillage : Uber, Instagram, Twitter, LinkedIn, etc. Notons que la grande majorité des exemples du graphique sont américains – et Californiens, même.
Super-licorne d’abondance
Comment expliquer la prolifération des licornes et des super-licornes, ainsi que leur développement très rapide ?
- Par l’adoption des smartphones, et l’amélioration des capacités des microprocesseurs, des capteurs et des technologies Cloud ;
- Par le précédent constitué par l’introduction en Bourse de Facebook en 2012, avec une capitalisation à 102 milliards de dollars (un record dans l’histoire d’Internet) ;
- Par l’afflux de fonds dans le capital-risque à la suite de cette valorisation en Bourse de Facebook, qui a poussé les investisseurs à prendre des risques ; la plus-value peut se révéler énorme si les sociétés concernées entrent en Bourse ou sont rachetées, comme Instagram ou WhatsApp.
Le propre de la licorne (et, de fait, de la super-licorne) est d’atteindre la barre du milliard, puis des 10 milliards de dollars, avant même l’introduction en Bourse. De fait, ces titres honorifiques de apparaissent comme des distinctions ultimes dans les mondes de la technologie et du business, des distinctions qui sont aussi des objectifs à atteindre pour les start-up.
Et en France ?
L’écurie européenne compte quelques licornes (Spotify en Suède, Delivery Hero en Allemagne, Shazam en Grande-Bretagne), mais les start-up françaises qui peuvent y prétendre semblent être encore plus rares que les licornes mythologiques. Critéo, spécialiste de la pub ciblée sur le web, serait un bon candidat… mais l’entreprise est cotée en Bourse.
Néanmoins, des entreprises comme Blablacar et Sigfoc pourraient bientôt intégrer le club des licornes, à condition de ne pas entrer en Bourse. C’est une excellente chose, mais il reste que la barrière qui les sépare des super-licornes est, elle, encore un fantasme.