Depuis notre tendre enfance, nous apprenions à peupler le système solaire de 9 planètes, la plus lointaine étant aussi la plus petite, et la plus riche en mystères : Pluton. Coup de théâtre en 2006 : la communauté scientifique décidait de rétrograder l’astre au rang d’objet stellaire. Second rebondissement : 8 ans plus tard, Pluton retrouve (presque) sa place aux confins du système solaire. Pour de bon ?
Quand Pluton n’était plus une planète du système solaire
À l’école, on apprend à réciter les planètes qui constituent le système solaire, dans l’ordre d’éloignement du Soleil. Les planètes telluriques (de formation rocheuse) : Mercure, Vénus, Terre, Mars. Les planètes gazeuses : Jupiter, Saturne, Uranus, Neptune. Et la petite dernière, tellement éloignée du Soleil qu’elle n’est qu’un bloc de glace flottant dans le vide : Pluton.
En 2006, le 26e Congrès de l’Union astronomique internationale a décidé de rétrograder Pluton. Que s’est-il passé ? En réalité, le comité d’experts mandaté par l’UAI avait deux choix : retirer à Pluton le statut de planète du système solaire, ou accueillir trois nouveaux astres solides orbitant à grande distance : Charon, Cérès et Xena (non, pas la guerrière !).
Or, comme l’indique cet article, 70% des votants ont choisi de bouter Pluton hors du système solaire, au prétexte que le petit astre ne répondait pas aux caractéristiques qui définissent un membre du club fermé des planètes, selon la résolution 5A :
- Une planète doit être un astre en orbite autour d’une étoile, sans être lui-même une étoile ;
- Elle doit être suffisamment massive pour que l’effet de sa propre gravité lui confère une enveloppe sphérique ;
- Elle doit dominer son environnement et avoir dégagé le voisinage autour de son orbite.
Malheureusement, la dernière proposition ne correspondait plus à la pauvre Pluton depuis la découverte des trois planètes naines déjà citées. Le système solaire venait de voir ses frontières brutalement réduites, et confiées désormais au douanier Neptune, grosse boule de gaz un peu tristounette dans son coin de vide stellaire.
Pluton outragée, Plutôt martyrisée, mais Pluton réintégrée !
Pendant 8 ans, il a fallu s’habituer à la rétrogradation de Pluton, passée de planète du système solaire (la classe !) à planète naine, ou même vulgaire objet stellaire. Nul doute que les autres objets stellaires du coin, avec leurs orbites hiératiques et leurs formes chaotiques, se sont beaucoup moqués du vilain petit canard.
Et voilà qu’en 2014, on assiste à un rebondissement : un groupe de scientifiques, réuni autour du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics, a organisé un nouveau vote sur la question, et a décidé de réintégrer Pluton à titre consultatif. Voici les arguments qui ont été avancés à l’occasion de cette soirée-débat d’importance cosmique :
- Le vote de l’UAI en 2006 n’était pas suffisamment représentatif (seuls 400 membres sur 6 000 étaient présents ce soir-là) ;
- Une planète naine reste une planète (sinon, cela s’appelle de la discrimination : dirait-on d’une personne de petite taille qu’elle n’est pas une personne ?) ;
- La découverte de nombreuses exoplanètes a contribué à redéfinir les conditions qui permettent à une planète d’entrer dans ce club très privé ;
- Le fait que Pluton réponde à deux éléments sur trois de la définition actée par la résolution 5A de l’UAI n’est pas un argument suffisant pour l’exclure.
Sans oublier l’argument le plus important, l’argument final : Pluton a toujours été, depuis sa découverte en 1930, considérée comme une planète du système solaire. Et on ne change pas si aisément des habitudes historiques, n’est-ce pas ?
Le visage d’Hadès
Cette décision en faveur d’une réintégration de Pluton comme planète du système solaire a trouvé, à l’été 2015, un soutien inattendu. C’est, en effet, à cette période que la sonde New Horizons a atteint le petit astre et nous a appris à mieux le connaître. En repoussant, au passage, les limites de l’exploration humaine du système solaire : l’Homme n’était jamais allé si loin.
Les photos envoyées par la sonde vont donner du grain à moudre aux astrophysiciens. Et leur donner l’occasion de faire mieux connaissance avec cette mystérieuse Pluton, nommée ainsi par une jeune Britannique de 11 ans qui, le 14 mars 1930, a choisi d’attribuer à cette nouvelle planète le nom romanisé du dieu grec des Enfers, Hadès.
Même si la décision des scientifiques du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics n’a rien d’officiel ou de contraignant, et que la communauté scientifique internationale n’a pas encore réintégré pour de bon Pluton dans le cercle des planètes de notre système solaire, preuve est faite, du moins, qu’il n’est pas si facile de se débarrasser du gardien du royaume infernal !